Retour aux dortoirs...

Sélénius referma son cahier, le cours de transmutation auquel il venait d’assister lui avait appris énormément de choses. A présent, le jeune garçon savait jouer les métamorphes en prenant l’apparence d’une personne qu’il avait touchée.

La simple poignée de main échangée avec Peter lui permettrait de prendre l’apparence de celui-ci pendant quelques temps. Mais Sélénius ne le ferait pas pour le moment, il avait bien senti que Peter ne l’appréciait guère…

Le jeune garçon déambula dans les couloirs , entra dans le parc et s’assit sur un banc pour faire un bilan sur sa première journée scolaire.

« C’est moi qui vient de penser ça ?! », s’était écrié Sélénius. En effet, l’idée de s’excuser au près de Peter venait de lui traverser l’esprit. C’est vrai que Sélénius avait enchaîné maladresses sur maladresses…

Les feuilles commençaient à tomber des arbres et l’hiver approchant, un semblant de sentimentalisme parcourait Sélénius. C’est à cette époque que son frère, Mithos, était décédé.

Cette « surdose » de sensibilité poussa Sélénius à s’excuser. Néanmoins, l’orgueil mal placé du jeune garçon l’empêcha de s’excuser face à face avec Peter.

Arrivé dans le dortoir, Sélénius prit un stylo, une feuille papier et écrivit une lettre d’excuses qu’il déposa sur le lit le plus à droite, celui de Peter.

Ce labeur achevé, Sélénius continua de ranger ses vêtements dans l’armoire…

Quelques minutes plus tard rentra Peter dans la petite pièce. La première chose qu'il vit était la présence de ce désagréable personnage qu'était Sélénius, et la seconde cette mystérieuse lettre déposée sur son lit. Contournant du mieux qu'il le pouvait le premier, il s'approcha avec méfiance du deuxième.

Elle lui était apparemment adressée... Sinon, que ferait-elle sur son lit ?

Il failli la prendre en mains, mais se ravisa au dernier moment : elle pouvait être piégée, protégée par un sort. Il le faisait bien, lui... Mais comment le savoir ? Il n'était pas formé pour contrer les sorts, mais bien pour les lancer. Il attendrait donc le retour du petit garçon aux cheveux mauves qui se disait appartenir à la Maison Blanche.

Se laissant tomber sur son lit -tout en évitant soigneusement de ne pas toucher la lettre- il repensa à ce qu'il avait appris au dernier cours de Nécro'... C'est-à-dire pas grand chose qu'il ne connaisse déjà.

L'espoir de Peter s'accomplit; Narcisse entra, plié en deux, dans la chambre. Contrairement à Sélénius ou Peter qui s'étaient immédiatement jetés sur la bibliothèque, Narcisse avait plutôt opté pour la cuisine. Triomphant, il avait dérobé toutes sortes de brioches à la framoise et petits pains au chocolat. Fier de son exploit, il étala le tout sur une petite table coincée dans un coin de la chambre et se saisit d'un appétissant croissant au massepain.
Il était très content de voir que ses deux amis étaient revenus.

-Vous pouvez vous servir, entre amis, on doit se serrer les coudes, dit-il, toujours tout sourire.
Reprenant une brioche à la dérobée, il alla s'asseoir à son lit tout en chantonnant d'une voix étouffée entre les bouchées qu'il avalait.

Un peu plus tard, Sélénius vit arriver Peter dans le dortoir mais celui-ci n’ouvrit point la lettre posée sur son lit.

Curieux de voir ce qu’attendait Peter pour ouvrir sa lettre, Sélénius n’eut d’autre choix que de s’adonner à l’une de ses passions : la divination.

Le jeune garçon sortit le fameux miroir, le posa face à lui, ferma les yeux en pensant bien à ce qu’il voulait savoir et les rouvrit.

Dans le miroir se dessinait les traits de ses deux jeunes colocataires. Peter tendait la lettre de Sélénius à Narcisse.

« Jamais, jamais ce petit résidu violet ne lira ou ne touchera cette lettre ! », pensa Sélénius.

Le jeune garçon reposa le miroir sur son lit, alla parler à Peter et lui d’un ton sincère un peu forcé mais du plus bel effet :

« Tu sais, cette lettre, c’est une lettre d’excuses et c’est moi qui l’ai écrite. Je sais que tu ne me fais pas confiance, mais tu peux l’ouvrir sans crainte… »

Jamais Sélénius n’aurait prononcé une telle phrase devant quelqu’un qui ne reconnaissait pas comme digne d’intérêt.

Résistant à la tentation de goûter une des sucreries qu'avait rapportées le petit bonhomme à la chevelure mauve, Peter s'apprêtait à lui demander d'inspecter la lettre quand Sélénius, armé de son miroir de divination à la con, avoua en être l'auteur... Ce qui l'enjoua encore moins à l'ouvrir !

- Bien... Comme maintenant je connais son contenu, je ne vois pas l'intérêt de l'ouvrir... dit avec pertinence Peter.

Alors qu'il la pointait doucement du doigt tout en murmurant une formule magique, l'enveloppe fut entourée de flammes vertes, et, quand ces dernières disparurent après quelques instants, comme si elles n'avaient jamais existé, il ne restait plus aucune trace de la lettre.

[Phrases à rallonges powaaaaa !]

Anticipant l'indignation de prétentieux de Sélénius, Peter joua le faux-cul :

- J'accepte tes excuses et en profite pour te donner les miennes, dit-il d'une voix amicale.

Ils m'ont déjà accepté, ils m'ont déjà accepté, ils m'ont... !
Dévorant un nouveau pain au chocolat doublé de crème banane, Narcisse suivait la "confrontation" avec de grands yeux intéressés. Mâchant rapidement, il s'étouffa à moitié et les interrompit un instant pour demander, d'une petite voix aigue et inquiète:
-Pardonnez moi, mais pourquoi vous excusez-vous ?

Sa crème banane dégoulina lors de cet instant d'inattention envers sa nourriture et tomba dans un petit bruit mou sur sa couverture.
-Mince... J'suis vraiment un boulet..., marmona t'il, tout confus.
Essayant d'être discret, il regarda si quelqu'un l'observait et hapa vite fait la crème qu'il avala.